Le Grenier de Clio : Anges et démons.

L'affaire d'Aix

Aix en Provence fut le théâtre d'une sombre affaire de sorcellerie au début du XVIIe siècle qui préfigure le drame de Loudun et le procès Girard et La Cadière.

Issue d'une famille noble, Madeleine de Demandolx de la Palud, agée de 17 ans, entra comme novice, en 1607, au couvent des Ursulines de Marseille. Elle avoua à sa Supérieure que son ex-confesseur, le Père Louis Gaufridi, avait été son amant et fut envoyée au couvent d'Aix où elle eut, en 1609, différentes convulsions et attaques dites diaboliques.

Les exorcismes du Père jésuite J. B. Romillon étant demeurés vains, elle continua à charger le curé Gaufridi en l'accusant de lui avoir imposé un « démon vert » et de l'avoir voulu faire reine des magiciennes, au sabbat. Elle contamina cinq autres nonnes dont la soeur Louise Capeau, qui rivalisa avec elle en extravagances.

En désespoir de cause, le Père Romillon les soumit toutes deux au Grand Inquisiteur Sébastien Michaëlis, qui avait fait brûler dix-huit sorcières en Avignon, en 1582. Il échoua en exorcisme public et les deux possédées passèrent au Couvent Royal de St-Maximin pour être exorcisées par le dominicain flamand, François Domptius.

Louise Capeau reconnut alors être possédée par trois démons : Verrine, Grésil, et Sonnillon, tandis que Madeleine était la proie de 6666 démons guidés par Belzébuth. Le 15 décembre 1610, le démon Verrine avoua publiquement par la bouche de Louise, que Gaufridi était responsable de la possession de Madeleine. Amené le 30 au Couvent, le curé fut chargé davantage encore par Madeleine. Il fut même emprisonné ; mais on dut le renvoyer à sa paroisse, faute de preuves. Il en appela à l'Evêque de Marseille, tandis que ses ennemis poussaient le procès au Parlement d'Aix, en février 1611, où Madeleine et Louise redoublèrent leurs exhibitions hystériques. Jeté en un donjon et torturé sur ordre de Michaélis, le Père Gaufridi reconnut avoir signé un pacte avec le Diable. Il se rétracta par la suite, arguant de la torture, mais le tribunal le condamna, le 18 avril 1611, et il fut brûlé vif le 30, après dégradation.

Cette cruelle exécution fut la conséquence de l'amour hystérique que lui avait vainement porté Madeleine. Cette dernière cessa sa possession le lendemain de l'exécution, mais fut encore accusée de sorcellerie en 1642 et en 1652, année où elle fut condamnée à la prison à vie. Relâchée après dix ans, elle mourut en 1670. Louise Capeau, elle, continua ses démonstrations de démonopathe.

Sources : Le dictionnaire du diable et de la démonologie